Suite au séisme de 2010 à Haïti, plus de 200 000 personnes ont trouvé la mort, presque autant ont été blessées, et un million et demi ont été déplacées. Même après six ans, on dénombre encore 60 000 sans-abri. Plus récemment, en Italie, près de 300 personnes ont été tuées, et plus de 60 000 se sont retrouvées sans toit, parmi lesquelles beaucoup demeureront dans des tentes jusque janvier ou plus tard.
À la lumière de récents articles de grands quotidiens mettant en évidence le coût économique et financier d’un séisme de forte ampleur à Los Angeles ou à Vancouver, il importe de comprendre que la conséquence la plus sérieuse d’un séisme est d’ordre social. Un puissant séisme à proximité d’une grande ville peut mettre à la rue des milliers, voire des millions de personnes, même si les immeubles sont conformes aux exigences minimales imposées par les normes de construction actuelles.
Beaucoup parmi nous sont persuadés que les immeubles des pays développés ne présenteront aucun risque à la suite d’un séisme majeur, une fausse impression de sécurité plus présente encore chez ceux d’entre nous qui résident dans des immeubles neufs. Voilà qui va à l’encontre de la réalité de la plupart des normes de construction du moment. Au Canada, par exemple, les immeubles sont répartis en quatre catégories d’importance, la plupart des habitations entrant dans la catégorie la plus basse. Même si un immeuble est conçu pour ne pas s’effondrer, cela ne signifie pas qu’il est prudent d’y habiter à la suite d’un séisme. Pour corser les choses, la plupart des normes n’exigent pas que les habitations plus anciennes soient modernisées, d’où un réel risque d’effondrement. Bien que le nombre de victimes d’un séisme puisse être moindre dans les pays industrialisés, il subsiste un risque de dommages économiques et sociaux majeurs.
Le pire, c’est que les catastrophes naturelles ne frappent pas équitablement les populations. En général, les membres les plus aisés de la société sont susceptibles de bénéficier d’une meilleure couverture d’assurance et ont de quoi se payer des moyens de transport en dehors de la zone sinistrée, ainsi qu’un logement de remplacement. Dans nombre de cas, les habitations plus cossues sont mieux bâties, et certaines sont dotées de systèmes de protection antisismiques, tels que des amortisseurs ou une isolation des fondations. Les moins chanceux bénéficient rarement de ces avantages et courent plus le risque de finir blessés, déplacés, voire à la rue. Pour les familles qui bataillent déjà pour s’en sortir, la perte de salaire et de logement est dévastatrice (les assurances habitation classiques ne couvrant généralement pas les séismes). Ceci peut se révéler particulièrement dangereux dans une ville comme Montréal ou dans d’autres régions où les séismes sont fréquents, car les températures hivernales demeurent au-dessous de zéro plusieurs mois par an.
La bonne nouvelle, c’est que nombreux sont ceux qui, dans ce domaine, se concentrent précisément sur ce point. De nombreux promoteurs se montrent prévoyants et se démarquent grâce aux protections antisismiques, surtout depuis que les amortisseurs à friction permettent de réaliser de nettes économies sur les coûts de construction. Dans les cercles d’ingénierie, comme lors de la 16e Conférence internationale de génie parasismique (16wcee), on se focalise sur ce même point et les ingénieurs s’interrogent : comment améliorer la résistance des immeubles et des infrastructures ? Certaines villes, comme San Francisco, prennent même les devants en évaluant les immeubles résidentiels et en exigeant une modernisation de ceux qui peuvent présenter un risque. À mesure que l’attention se porte sur la résistance et que les entreprises reconnaissent l’importance de pratiques commerciales déontologiques, il ne nous sera peut-être pas nécessaire de recourir à un renforcement de la réglementation pour améliorer la sécurité antisismique, mais il serait appréciable de disposer de normes de construction qui ne laissent pas tant des nôtres sans abri.